(NOM) Grimmwolf (prononcé Grimme-wolffe). (PRÉNOM) Gaelan (prononcé Gay-lan). (ÂGE) 43 années de banalité affolante. (DATE ET LIEU DE NAISSANCE) Seize septembre, New Jersey. Rien de palpitant en somme. (OCCUPATION OU ACTIVITÉ) Réparateur de postes de télévisions à son compte, il vagabonde de client en client, de voisin en voisin. (NATIONALITÉ) Américain pur et dur souffrant d'un patriotisme légèrement empourpré par une idéologie de suprématiste blanc. (ORIGINES) Américain sur toutes les générations qui importent véritablement. Il doit y avoir de l'Amérindien quelque part dans le mélange, un sac d'os que la famille Grimmwolf a toujours pris soin de contourner. (STATUT CIVIL) Célibataire jamais divorcé, jamais marié, jamais fiancé. (ORIENTATION SEXUELLE) Asexuel malgré son comportement particulièrement physique. (DATE D'ARRIVÉE AU PARKING) Depuis le 12 Octobre 2016, le fait que personne ne soit au courant de son existence témoigne du point auquel il est mémorable. (GROUPE) Ceux qui vivent.

« ÇA ME LES BRISE SÉVÈRE. »

(QUAND ET COMMENT AVEZ VOUS EMMÉNAGÉ AU PARKING ?) Une éviction inattendue et un ultimatum serré l’ont poussé à chercher un nouveau foyer après avoir passé dix années dans le même appartement à New Jersey. Après plusieurs heures de recherche désespérée, son attention s’est posée sur ce petit studio assez serré dans lequel il serait très probablement amené à devenir claustrophobe. Un rapide coup d’oeil au loyer avait suffi pour l’encourager à signer un bail d’un an pour cet espace confiné dans lequel il passerait trop de son temps. Si pour certains, un déménagement serait signe de nouveau départ, pour Gaelan, il s’agit simplement d’un imprévu peu accommodant.

(QUE PENSEZ-VOUS DE L'IMMEUBLE ET VOS VOISINS ?) Gaelan a toujours été un homme très privé ; ainsi, connaître ses voisins n’a jamais été une activité qui l’intéressait particulièrement. S’il s’efforce à leur sourire et à leur dire bonjour lorsqu’il les croise, c’est uniquement afin de mieux vendre ses services en tant que réparateur de télévision aux rares intéressés. Il lui semble d’ailleurs que certains habitants du parking sont comme lui et ne possèdent pas de télévision – pour les affaires, cela ne présage rien de bon.

Concernant l’immeuble, l’opinion de Gaelan est claire et concise : c’est un immeuble. Les briques sont sales et abimées mais pour un type qui ne se douche que lorsqu’il a besoin d’aller à la banque, cela suffit amplement. Au final, l’immeuble lui correspond plutôt bien, bien qu’il ne le dirait jamais de vive voix.

(QUELLE EST VOTRE RÉPUTATION AU SEIN DU QUARTIER ?) Qui connaît Gaelan ? Hormis les rares chanceux ayant eu l’opportunité d’admirer la raie de ses fesses lorsqu’il s’accroupissait pour faire des réglages sur leur poste, peu de gens ont réellement eu l’occasion de lui parler. Ceux ayant eu la chance de pouvoir croiser sont chemin diraient certainement qu’il est poli mais distant. Au final, personne ne sait grand chose sur lui, comme s’il cachait un terrible secret. La vérité, c’est simplement que Gaelan est un homme banal sans réel intérêt. Taillé pour la médiocrité, s’il y a bien une chose qu’il sait faire à la perfection, c’est d’être complètement quelconque.

Difficile de définir un homme qui ne se définit pas.
Difficile de décrire quelqu'un qui ne se cherche pas.

Invisible dans une foule, ce n'est pas lui qu'on qualifierait d'inoubliable. Tout est fade chez lui. Gaelan, c'est l'homme qui mange de l'eau déguisée en purée ; celui qui s'endort sur un canapé sans jamais penser à se réveiller. C'est celui qui peut rester des heures entières à regarder le plafond, sans jamais s'impatienter ni s'ennuyer. Il n'y a pas d'émotions dans la toile de ses pensées : il n'y a que l'indifférence à tout qui le caractérise depuis toujours. Immunisé à l'humanité, sa vision du monde est méthodique et catégorique. Il se lève. Il mange. Il dort. Il boit. Il mange, encore. Il boit, toujours. Il dort. Les seuls plaisirs dans sa vie sont ceux qu'il qualifie comme étant véritables : la bière et les pommes de terre. Simple d'esprit, mais pas méchant, il vit sa vie comme il l'entend. Il y a des choix, des actions, des décisions. Tout est rangé, généralement, sa vie axée autour de questions qui lui permettent de faire des choix essentiels tel que savoir s'il devrait porter un caleçon sale ou faire tourner une machine, manger des chips ou des patates et dormir ou dormir encore plus. La joie, la tristesse, par contre ... Ça n'existe pas. Tout ... va. Ni bien, ni mal. Tout va, constamment, perpétuellement, systématiquement. Il est méthodique.

Casanier, il n'aime pas sortir de chez lui. Lorsqu'il ose à s'aventurer dans le monde extérieur, il s'agit très certainement d'une mission de réapprovisionnement de la plus haute importance ou d'une opportunité de travail survenue au dernier moment. S'il ne travaille pas particulièrement souvent et s'il ne possède pas un talent inné pour ce qu'il fait, ça a toujours été suffisant pour lui permettre joindre les deux bouts et pour lui, c'est le principal.

Lorsqu'il quitte sa tanière, il reste toutefois imperméable au monde extérieur ; incapable de remarquer les regards figés sur lui, il se contente de suivre son chemin avec assurance. Et pourtant, simplement en se promenant dans la rue, il devient plein de choses qu'il n'aurait jamais rêvé être. Certains voient en lui un prince charmant destitué de sa fortune, d'autres remarquent un rat d'égout à l'hygiène déplorable. Il impressionne les enfants qu'il intimide ou effraie et provoque les rires chez les adolescents écervelés. En réalité, il n'est rien de tout ça : simplement un homme ordinaire, dépourvu de toute vision. L'ambition n'ayant jamais fait partie de son vocabulaire, l'idée même de devenir plus que ce qu'il a toujours été ne lui a jamais traversé l'esprit, c'est un fait.

Maintenant qu'une moitié de sa vie est passée, il voit encore moins d'intérêt à vivre autrement. Être monsieur tout le monde est un rôle qu'il prend très au sérieux et qu'il joue avec brio sans faire le moindre effort. S'il y a bien une chose en laquelle Gaelan excelle, c'est bel et bien dans l'art de la médiocrité.